Techniques de cuisson thaï pour la viande, le poisson et les fruits de mer
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Comprendre les techniques de cuisson appliquées aux viandes, poissons et fruits de mer en Thaïlande
Cet article se concentre sur les préparations dont l’élément principal est la viande, le poisson ou les fruits de mer et il les analyse sous l’angle des techniques de cuisson. Ces techniques occupent une place importante dans la structuration des plats thaïs, où le choix du mode de cuisson détermine la texture, la composition des sauces et l’équilibre aromatique. L’objectif n’est pas de dresser un inventaire exhaustif, mais de montrer comment quelques recettes représentatives illustrent l’usage de ces techniques dans différentes régions du pays.
Six familles de techniques sont abordées : la friture, la vapeur, les mijotés issus des traditions sino thaïes, les cuissons braisées et les cuissons à chaleur douce, les cuissons à chaleur sèche et les grillades, ainsi que les saucisses, qui forment une catégorie distincte en raison de leurs modes de préparation et de leurs usages régionaux. Ces techniques complètent celles abordées dans nos articles consacrés aux salades, aux currys, aux soupes et aux plats sautés.
La friture dans la cuisine thaï
La friture occupe une place centrale dans de nombreux plats thaïlandais. Elle permet d’obtenir une surface croustillante tout en préservant la tendreté de la chair.
Le poulet frit est sans doute la recette la plus représentative de cette technique et également une des plus populaires à l'échelle du pays. La viande est d’abord marinée : il existe maintes variations autour des marinades mais on y retrouve couramment sauce poisson et sucre, graines et racines de coriandre, cumin, poivre blanc et ail. Elle est ensuite enrobée d’une panure légère, à base de farine croustillante ou de fécule, puis plongée dans une huile suffisamment chaude pour obtenir une peau croustillante qui va contraster avec la chair moelleuse. Le poulet frit est accompagné d'une sauce trempette à base de piments doux, ce qui rappelle le principe de certains en-cas frits. Pour autant il s'agit bien d'un plat à part entière et non pas d'un simple en-cas car il est accompagné le plus souvent de riz gluant. C'est une recette fort populaire, en particulier à l'heure du petit déjeuner.
Ce principe s'applique également aux poissons frits. Dans ce cas, le poisson est souvent frit en entier, ouvert en portefeuille. Lorsqu'il s'agit de gros poissons à chair ferme, comme le thazard par exemple, on découpe des tranches épaisses. S'agissant des petits poissons tels que les poissons des sables, ils sont simplement vidés puis consommés entiers.
Il existe différentes variantes autour de cette technique de cuisson du poisson. Le principe de base reste le même : parfois le poisson est mariné ou assaisonné mais ce n'est pas systématique, puis il est enrobé très légèrement de farine avant d'être immergé dans un bain de friture. On va rechercher à obtenir un poisson très croustillant, il est donc techniquement surcuit mais, lorsque la technique est bien appliquée, il n'est pas pour autant desséché. Ensuite ce poisson est servi avec une sauce trempette, comme par exemple dans le cas du thazard frit à la sauce poisson, pla insee tod nam pla, une spécialité du Sud. D'autres recettes comprennent une sauce relativement simple que l'on verse sur le poisson frit, comme par exemple dans le cas du pla jian, un poisson frit servi avec une sauce aigre-douce au gingembre et tamarin.
Enfin parfois la technique est hybride : le poisson est découpé en bouchées avant d'être frit puis brièvement sauté avec d'autres ingrédients. Par exemple, dans une famille de recettes fort populaires en Thaïlande, appelée pla sam rot, le poisson aux trois saveurs, on peut trouver aussi bien du poisson entier sur lequel on verse une sauce que du poisson coupé en bouchées qui sont frites puis parfois simplement mélangées avec la sauce, voire sautées avec la sauce.
La vapeur
La cuisson à la vapeur occupe une place importante dans la cuisine thaïlandaise. Elle s'applique à toutes sortes de préparations, de l'entrée au dessert.
S'agissant des poissons et des fruits de mer, elle permet de conserver une texture moelleuse. Cette technique repose sur des temps de cuisson courts et sur un assaisonnement ajouté après la cuisson ou directement sur le produit pour imprégner délicatement la chair sans la dénaturer.
Le poisson à la vapeur au citron, pla neung manao, constitue l’une des préparations les plus emblématiques dans ce registre. Le poisson est cuit quelques minutes à la vapeur, souvent accompagné de ciboule et de gingembre qui parfument discrètement la chair. Une fois cuit, il est nappé d’un assaisonnement composé de citron vert, de sauce poisson, d’ail et de piments frais. Ce mélange, versé sur le poisson encore chaud, crée une sauce rafraîchissante qui équilibre acidité, salinité et chaleur aromatique.
La cuisson vapeur est moins courante pour les viandes mais elle existe cependant. Citons par exemple le poulet aux herbes à la vapeur, kai muang neung samun prai, une recette très intéressante du Nord de la Thaïlande. Le poulet est cuit entier et, préalablement à la cuisson, il est "massé" avec une pâte de piment, que l'on dépose également à l'intérieur du poulet. Ensuite le poulet est cuit à la vapeur mais l'on place un récipient dans l'appareil à vapeur, sous le poulet, qui va recueillir ses jus de cuisson. Une fois le poulet cuit, on récupère la pâte de piment à l'intérieur du poulet et on la mélange aux jus de cuisson, puis on sert ensemble le poulet et sa sauce aux jus pimentés.
Ces deux recettes montrent la polyvalence de la cuisson vapeur dans la cuisine thaïlandaise.
Les mijotés dans les traditions sino thaïes
Les mijotés occupent une place marginale dans la cuisine thaïlandaise contemporaine. La plupart des plats thaïlandais sont basés sur des cuissons rapides. Lorsqu’un mijotage apparaît, il provient généralement d’influences extérieures, en particulier des traditions sino thaïes.
Le moo palo en est l’exemple le plus connu. La recette associe poitrine de porc, œufs durs marinés, cannelle, badiane, shiitake, sucre et sauces soja claire et noire. La cuisson lente permet d’obtenir une viande fondante et une sauce concentrée, dense et très aromatique. Ce plat est aujourd’hui courant dans toute la Thaïlande, bien qu’il ne relève pas de la tradition culinaire thaïe ancienne.
Le jarret et pied de porc mijotés, khao kha moo, suivent le même principe. La viande cuit dans un bouillon parfumé au galanga, à l’ail, à la cardamome et aux shiitake. La réduction finale du bouillon produit une sauce riche en umami, proche des préparations retrouvées dans les cuisines sinisées de l’Asie de l’Est. Comme pour le moo palo, cette recette n’est pas représentative de la majorité des pratiques culinaires thaïlandaises mais elle fait partie du répertoire domestique moderne.
Dans les deux cas, ces plats sont servis accompagnés de riz. Dans le cas du jarret mijoté, on sert également une sauce aigre-piquante en accompagnement de la viande.
En dehors de ces quelques recettes emblématiques, on retrouve peu de plats mijotés à part certaines soupes ou currys dont les ingrédients nécessitent une cuisson longue. C'est par exemple le cas des recettes à base de kai baan, un poulet fermier à chair très ferme ou de certaines recettes régionales comme les maquereaux mijotés en sauce sucrée-salée, pla tu tom wan (Plaine Centrale), ou encore le porc mijoté aux épices, chin hum (Nord).
Cuissons braisées et cuissons à chaleur douce
Les cuissons braisées vont permettre de valoriser des morceaux qui sont naturellement plus fermes et qui nécessitent une cuisson prolongée pour les attendrir. On ne cuisine pas beaucoup le bœuf en Thaïlande mais certaines parties du porc se prêtent bien à une cuisson braisée. C'est le cas par exemple des recettes à base de travers de porc. Typiquement, les travers de porc sont sautés à feu vif jusqu'à obtenir une coloration uniforme puis on introduit des ingrédients humides et aromatiques tels que, par exemple, des oignons et de l'assaisonnement sucré et salé comme dans le cas du porc caramélisé. La cuisson est ensuite prolongée à couvert jusqu'à obtenir une viande fondante.
D'autres techniques de cuisson associent une saisie à feu vif puis une cuisson à feu très doux en casserole couverte, sans ajout de liquide. C'est par exemple le cas du filet mignon de porc au citron, mu manao. Cette recette constitue un exemple d'autant plus intéressant qu'elle se décline selon différentes techniques de cuisson selon l'ingrédient de base utilisé : à la vapeur avec du poisson, pla nueng manao ou en grillade avec du calamar, pla muek yang manao. Dans le cas de notre filet mignon, celui-ci est cuit isolément avec une chaleur douce qui va lui conserver sa tendreté, puis il est dégusté avec une sauce aigre, douce et piquante à base d'ail, piment, citron vert et sauce poisson.
Enfin d'autres recettes privilégient une saisie à feu vif, suivie d'une cuisson à feu doux avec ajout de liquide mais en casserole découverte. La recette qui est sans doute la plus emblématique de cette technique, nous vient du Sud de la Thaïlande. Il s'agit du mou oong, une spécialité sino-thai de la province de Phuket. La poitrine de porc, tranchée, est marinée aux herbes, épices, sucre et sauce soja. Elle est ensuite revenue à feu vif jusqu'à ce qu'elle caramélise légèrement. Puis la cuisson est prolongée en ajoutant du liquide et à feu très doux, jusqu'à ce que le liquide soit évaporé et que la viande devienne fondante.
Cuissons à chaleur sèche et grillades
La poitrine de porc croustillante, est l'illustration emblématique de la cuisson à chaleur sèche. Pour réaliser cette recette immensément populaire, la viande est d’abord bouillie afin de détendre les fibres et d’amorcer la cuisson. Elle est ensuite séchée, de préférence au soleil, dans un lieu bien ventilé, ce qui prépare la peau à devenir croustillante. Le passage au four, à chaleur modérée, permet au gras de fondre progressivement tandis que la couenne se rigidifie et prend une couleur dorée. Ce processus produit une texture particulièrement recherchée, avec une couenne très croustillante et une viande tendre. La poitrine est ensuite servie seule ou intégrée à d’autres recettes, dans des plats sautés par exemple. Traditionnellement cette recette était préparée avec une cuisson dans de grandes jarres en terre cuite, restituant une chaleur homogène et prolongée, utile pour cuire doucement la viande. C'est encore le cas aujourd'hui, mais beaucoup plus à la marge.
Les grillades font partie des modes de cuisson utilisés dans toutes les régions de Thaïlande et on peut les appliquer aussi bien aux poissons, aux fruits de mer et aux viandes. Citons quelques recettes régionales emblématiques telles que les gambas de rivière d'Ayutthaya grillées, kung maenam yang (Plaine Centrale) où les gambas sont découpées dans le sens de la longueur et grillées uniquement côté carapace pour cuire doucement la chair, sans la dessécher. Une autre recette fort appréciée nous vient de l'Isan, l'échine de porc grillée, ko mu yang. Dans ce cas, l'échine de porc est marinée avant cuisson avec des assaisonnements sucrés et salés ainsi que du lait. Enfin, citons le Nord et ses recettes mystérieuses, avec par exemple la famille appelée êp, qui rassemble des plats à base de protéines animales, (poisson, très jeunes grenouilles, toutes petites crevettes, porc haché ou encore cervelle de porc) mélangées à une pâte de piment et grillées, enveloppées dans des feuilles de bananier.
Le panorama des grillades ne serait pas complet sans évoquer le poisson grillé en croûte de sel, pla pao, qui est une véritable star de la cuisine de rue, populaire dans tout le pays. Ce sont généralement des poissons d'eau douce tels que le tilapia gris ou rose qui sont utilisés. Le principe est toujours le même : le poisson est vidé par les ouïes et des herbes telles que la citronnelle et les feuilles de kaffir sont introduites par la bouche et poussées jusqu'à l'abdomen. Le poisson est ensuite recouvert d'une couche de sel mêlée à la farine puis grillé. La couche de sel permet de cuire le poisson tout en le gardant très juteux.
Les saucisses
Les saucisses constituent une famille à part entière dans la cuisine thaïlandaise. Elles se distinguent moins par un mode de cuisson unique que par la composition de la farce, l’usage de boyaux naturels ou de feuilles de bananier, et l’ancrage régional très marqué.
La saucisse de Chiang Mai, sai ua, est une recette incontournable pour qui veut découvrir la culture culinaire du Nord de la Thaïlande. Ces saucisses reposent sur une base de porc haché mélangée à une pâte de piment aux saveurs plus ou moins complexes (il existe de multiples variantes) ainsi que des herbes aux arômes puissants telles que les feuilles de kaffir. La saucisse est traditionnellement grillée même s'il est de plus en plus courant de la faire cuire au four.
La saucisse de l’Isan, sai krok isan, caractéristique du Nord Est, associe viande de porc hachée, ail, riz cuit et sauce poisson. La farce est mise en boyau puis cuite au four ou grillée. Sa saveur repose sur l’équilibre simple entre l’ail, le poivre blanc et une pointe de sucre, et elle est toujours servie avec du gingembre frais, du chou et des piments.
La saucisse fermentée, appelée nêm mou, également originaire de l'Isan, suit un processus différent. La farce, composée de porc haché, de riz gluant cuit et d’ail, est roulée dans des feuilles de bananier, puis laissée à fermenter plusieurs jours. Cette fermentation courte développe une acidité naturelle qui constitue la signature de cette préparation. Le nêm peut être dégusté tel quel, intégré à des salades ou utilisé comme ingrédient dans des plats sautés.
Pour aller plus loin
Pour approfondir les techniques présentées ici, vous pouvez consulter notre livre Viandes, poissons et sauces piquantes, qui rassemble un certain nombre de recettes mentionnées dans cet article, tandis que les variantes régionales sont abordées dans les articles de blog et livres de recettes dédiés.
Si vous souhaitez découvrir ces techniques lors d’un cours pratique, nos cours de cuisine thaï à Koh Samui permettent d’explorer la friture, la vapeur, les grillades ou encore les préparations mijotées à travers un large choix de plats traditionnels.
Enfin, pour les préparations fondées sur les techniques sautées, qui ne sont pas traitées dans cet article, vous pouvez consulter notre article consacré aux plats sautés dans la cuisine thaï, qui complète ce panorama des modes de cuisson utilisés pour la viande, le poisson et les fruits de mer.



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